Flatbush Zombies: bros before… all – Check

Flatbush Zombies: bros before… all

6 février 2019

Check

Il est des trio que l’histoire n’oubliera jamais ; les 2be3, les Destiny child, Les Mousquetaires, Two Girls one cup, les Inconnus ou encore les Supers Nanas nombreuses sont ces équipes qui, à trois, ont marqué les esprits de toute une génération grâce à des performances hors du commun. 2018 a sonné l’entrée au Hall of Fame des triplettes prodigieuses de Flatbush Zombies, ce trio fraternel New-Yorkais composé d’Erik Arc Elliot, Meechy Darko et Zombie Juice. Alternatif, indépendant, versatile et paradoxal le groupe a su depuis 2010 avancer pour séduire un public toujours plus large tout en conservant l’originalité qui a séduit les fans de la première heure.

Après Clockwork Indigo et 3001 A Laced Odissey, ils sont revenus en avril 2018 avec leur deuxième album VIH (Vacation in Hell), moins vaporeux que le précédent mais tout aussi bon. Une fois de plus, les trois compères ont choisi un titre d’album en clin d’œil à un film barré. Avec ce projets, les brooklynois semblent s’être ouverts artistiquement et proposent plus de collaborations qu’à l’accoutumé : on retrouve évidemment des new-yorkais en les personnes d’A$ap Twelvy, Joey Badass, Jadakiss, et des mecs comme Denzel Curry, Bun B, ou plus étonnant encore, le groupe de rock originaire d’Alaska, Portugal The Man, sur le titre « Crown ».

Bonne nouvelle, comme on a les meilleurs festivals en Belgique, ils seront à Dour en juillet prochain, l’occasion de mesurer aussi leurs talents impressionnants sur scène !

En attendant, on a papoté avec eux pour parler de différents sujets qui les caractérisent. On a parlé de leur quartier, de leur amitié qui semble être au dessus de tout, de leur dernier album, de leur rapport au cinéma, de drogue, de catch et de la dualité « bien – mal ».

Vous vous appelez Flatbush Zombies en référence au quartier de Brooklyn dans lequel vous avez grandi et habitez toujours. Comment décririez-vous la zone ?
Juice:
Flatbush c’est chez nous, c’est nous. C’est de là qu’on vient, c’est là qu’on vit, c’est notre zone. On a fait nos armes là-bas. C’est une zone de Brooklyn donc tu peux y croiser des mecs qui dorment dans la rue, il y a toujours du crime mais il y a eu beaucoup de mouvements ces dernières années. Aujourd’hui, en 2018, ça se gentrifie de plus en plus. On voit des commerces, comme des coffee shop un peu hypster,  bourgeonner de partout.  
Meechy : Exact.


Vous avez grandi à Flatbush et êtes devenus amis là-bas. Vous pensez que votre amitié est la base de votre succès aujourd’hui ?

Erik : Absolument. Je parle pour le groupe mais on est amis avant tout. On s’est mis à faire de la musique ensemble parce qu’on était potes. On avait le même rapport à la musique et on s’est mis à en faire ensemble. Toutes les épreuves qu’on a surmontées ensemble, les galères qu’on a partagées, ça nous a nouées, et c’est surement ce qui fait la différence aujourd’hui ; nos expériences communes ont forgé notre musique.

Meechy : Honnêtement –même si je les salue tous – aucun groupe de rap, que ce soit NWA, ou le Wu-Tang, n’a incarné la fraternité et chanté l’amitié comme on le fait.
Aucun ne peut se vanter d’avoir une amitié aussi forte que la notre. Des liens vraiment forts nous unissent et aucun autre groupe ne en peut dire de même, ils mentiraient.

Ok et c’est quoi le truc le plus fou que vous ayez fait tous les trois – à part bien sur faire de la bonne musique ?

Erik [Rires] : J’aime te l’entendre dire. Après, ça reste en lien avec la musique mais je pense que c’est d’avoir eu l’opportunité de voyager à travers le monde. On a l’occasion de partir à Tokyo, Paris, en Australie, en Nouvelle-Zélande entre pote pour faire ce qu’on aime. Que demander de plus ?

Vous parliez tout à l’heure des épreuves que vous avez vécues. Vous vous livrez beaucoup à ce propos justement. Surtout toi Meechy. À travers des titres comme « Fly Away » sur le précédent album et « U&I » sur ce dernier tu en dis beaucoup et parle à cœur ouvert. Pourquoi ce besoin de se révéler ?

Meechy : On est ce genre d’artiste qui parle de réalité. On raconte des choses vraies, on n’est pas là pour raconter des craques. Ca me soule toutes cette fantaisie et ces mensonges dans le rap.

Tu le dis d’ailleurs dans « Crown » : «Don’t be the type to talk about shit and not live it /  I manifested every single one of my visions »

Meechy : Exactement. Pour nous, c’est super important de parler de choses qui nous sont réelles et de communiquer sur la fraternité, l’amitié ou la bienveillance qu’on devrait tous avoir envers les uns, les autres. C’est la clé je pense. Aucun de mes artistes favoris n’a de titre qui parle autant de fraternité que les nôtres. Je considère donc que c’est notre job de le faire en racontant des histoires authentiques. On a fait une interview l’autre jour, et je disais que j’en avais marre de tout ce fake qu’on trouve partout dans la vie de tous les jours.

C’est pour ca qu’on parle d’amitié, avec authenticité, et de choses réelles qu’on vit au quotidien. L’amitié a commencé avant la musique.

Pour revenir sur le fait que je me livre beaucoup, je pense que parler de ce qui peut être considéré comme une faiblesse te rend plus fort. On ne veut pas mentir et faire croire que tout est tout beau tout rose. Si ce n’est pas le cas on le dit et ça rend notre musique plus réelle.

Il y a quelque chose de très paradoxal c’est que vous essayez, d’inciter les gens à penser positif, à s’ouvrir l’esprit, et en même temps, vous avez un coté très psychédélique, parfois suicidaire dans votre musique?

Erik : C’est de notre responsabilité en tant qu’artiste, d’ouvrir l’esprit de nos frères et sœurs, que ce soit en positif ou en négatif. On vient de Flatbush, donc on sait ce que c’est que de grandir dans la merde. C’est pour ça qu’on présente deux facettes.

Meechy : On incarne tous la dualité. Si tu prends que le positif qu’on te montre d’une icône de la chanson par exemple, c’est biaisé. On va te montrer ses belles vacances, ses belles voitures, mais on va rarement te parler de ses coups durs ou ses problèmes. Tu vas croire n’importe quoi, et tu ne connaitra pas la réalité de cette personne.

On a tous nos personnalités : Erik est comme ça, moi comme ça, Juice comme ça. On est différents des autres. Ce qu’on a vécu, où on a grandi, tout ça nous a forgé. Etre attiré par ce qui est psychédélique, les films, l’architecture, c’est des trucs qui n’étaient pas normaux pour des mecs ayant grandis à Flatbush. C’est paradoxal ça aussi car ça m’a forgé et c’est pour ça que pour certains, je suis étrange. Tout est question de dualité pour moi ; le pour-le contre, le bien-le mal, le blanc- le noir… Si tu as besoin de moi je serai là, mais si tu me la mets à l’envers je te butte, tout ça est paradoxal. Notre musique représente cette la dualité aussi dans un sens.

Je parlais avec un rappeur français qui me disait que, pour lui, les groupes étaient par définition, voués à se séparer avec le temps. Vous en pensez quoi ?

Meechy: Je pense que je viens juste de te répondre. En terme d’amitié et de fraternité, on est comme aucun autre groupe et on affrontera toutes les épreuves ensemble.

En parlant de rappeur français, vous en connaissez?

Meechy: euh

Juice: Oui, un peu.

Erik: Je connais MC Solaar, Booba.
Juice: Il y en a aussi Niska, je ne sais pas si je le prononce bien [Il le prononçait bien]

Parlons un peu de cinéma. Vous semblez avoir beaucoup d’attrait pour le cinéma à la Kubrick.  Votre Ep commun avec The Unerdarchievrrs s’appelait Clockwork Indigo, votre premier album 3001 : A Laced Odissey, et le dernier Vacation in Hell.  Pourquoi ?

Meechy : [Rires] Pourquoi?! Encore quelque chose qu’on affectionne tous les trois. On essaye pas forcement de s’en inspirer mais on pioche dans tous ce qu’on aime et qui gravite autour de nous. Kubrick, ou Greene ont un rapport différent à certaines choses dans leurs films, nous c’est à travers la musique. Donc il y a des parallèles à établir entre nos arts respectifs.

Si vous pouviez prendre la peau d’un personnage de film, vous choisiriez qui ?

Meechy : Moi, j’adorerais jouer Blade et j’aimerais surtout faire un remake de Menace to Society avec Juice. J’aime trop de personnages donc je saurai difficilement choisir…

Eh les gars, vous allez attendre que je finisse l’interview tout seul ou vous allez m’aider à répondre aux questions ?! [Rires]

Elle est belle la fraternité…

[Rires]

Erik : Je serai Morpheus.
Juice : J’avoue ça serait drôle de choisir des rôles de personnages pour une journée ou une semaine, mais dur de choisir.  

Vous avez réalisé deux vidéos pour teaser la sortie de l’album en plus du clip de “Headstone” ; le documentaire « Building a Ladder » et une mini comédie « Vacation (The Movie) ». C’est une manière d’en dire un peu plus sur vous à chaque fois ou juste un outil de promo ? 

Juice: Il y a un peu des deux. On est tous les trois des férus de cinéma. On est inspirés par des réalisateurs comme ceux dont on parlait tout à l’heure. En même temps, c’est une manière de montrer qu’on a plus d’une corde à notre arc. Dans « Vacation (The Movie) », tu retrouves Ice-T, Lin-Manuel Miranda, John Leguizamo, des mecs qui nous valident qui nous valident et nous respectent pour ce qu’on fait. C’est aussi une forme de fraternité.

On va parler de quelque chose qui semble aussi beaucoup vous unir ; la drogue. C’est un gage de créativité ?  

Erik : Personnellement, je fume seulement de la weed et j’ai toujours été créatif avant même de fumer. Ça m’aide à être dans un certain état d’esprit, mais ça ne m’aide pas à créer.

Juice : Je ne pense pas que les drogues te rendent créatives. Elles t’ouvrent l’esprit et t’aident à te questionner sur certaines choses. Elles t’offrent un niveau de réflexion supérieur, mais je suis d’accord avec Erik, je ne pense pas que ça te rende créatif en soit.

Meechy: Plein de mecs qui nous ont suivis dans le LSD auraient pu devenir de bons rappeurs mais, hélas, ça n’a pas été le cas. Ça prouve bien ce qu’ils viennent de dire. Si la vie était plus simple pour certains, ils ne prendraient pas de drogues. J’aimerai que ce soit plus facile pour eux.

Vous pensez quoi du fait que la weed soit illégale en France ?  

Erik : A vrai dire…
Meechy : Rien à foutre de ce qui passe en France, on a assez galéré ici à cause de ça. Là on est en Californie on profite de chaque variété. [Rires]

Encore un truc assez peu commun chez les rappeurs : vous êtes fans de cacth. D’où vous vient cette passion? Vous aviez fait des vidéos promos avec XXL en reprenant le format des vidéos de catch.  

Meechy: Ca fait partie de ces trucs qu’on kiffe depuis l’enfance.

Juice : Oui, on a toujours suivi depuis gosse. Les premiers catcheurs que j’ai vus c’était Hullk Hogan et l’UnderTaker. On est dedans depuis les années 90s, même quand on ne regardait pas à la télé, on lisait pour savoir ce qu’il se passait. C’est une passion qu’on a depuis jeune.

Et vos catcheurs favoris alors?

Juice : Shawn Michaels, The Undertaker.
Meechy : The Rock
Erik : Moi je dirai Roddy Piper et Rob Van Dam. RVD 420 baby! [Rires]

Un dernier mot?

Meechy : Open Your Fuckin’ Mind !
Erik : On s’attrape en Europe.
Meechy : “Ça suffit!”

Salim Jawad

Check

Check est une marque francophone de production de contenus urbains. Fruit d’une collaboration inédite entre le label Back in the Dayz, la société de production digitale Digizik et le journaliste Martin Vachiery, Check est une plateforme web qui met en lumière tout ce qui fait la richesse et la diversité d’une nouvelle culture urbaine. Un média curieux, impertinent et libre. Check rassemble, en impliquant les meilleurs artistes dans tout le processus créatif.