Hornet, la meilleure frappe du 93 – Check

Hornet, la meilleure frappe du 93

1 février 2020

Triple Sept

Rappeur déterminé,  Hornet la Frappe a réussi à atteindre, à force de travail et d’acharnement, une situation stable dans l’industrie du rap français en quelques années. C’est sur un rooftop dans le 19ème arrondissement de Paris que je rencontre un artiste efficace en studio et discret sur les réseaux,  pour parler de la sortie de “Ma Ruche”. Celui dont beaucoup connaissaient les tubes mais pas forcément le visage, se dévoile petit à petit au fil des projets, et semble aujourd’hui prêt à aller à la rencontre de son public à travers ce deuxième album.

Salut Hornet ! « Ma Ruche », c’est donc ton 4ème projet, et deuxième album. Quelles sont les principales directions qui ont été prises dans sa réalisation ?

Là on est en promo, c’est un peu ce qui change de d’habitude, parce que j’en ai pas beaucoup faite en 3 ans, sur mes deux derniers projets, là je compte bien défendre le projet.

On a fait le tour des projets qui étaient sorti, j’ai un peu plus concentré ce projet avec ce que les gens préféraient d’Hornet, j’ai essayé de faire moins de chose dans la mélancolie, plus de morceaux ouvertS tout en gardant ma plume, mes mots et mon univers musical.

Sortir de la mélancolie, c’est quelque chose que tu as fait pour toi, pour ton bien, ou c’est par rapport aux différents retours que tu as eu du premier album ?

Non, même pas. C’est qu’avant, je me plaignais de beaucoup de choses, mais aujourd’hui je n’ai plus la même vie on va dire, je suis un peu plus heureux. C’est aussi l’âge, je vis avec plus de recul, j’ai voulu partager cette humeur dans ce projet. C’est pas forcément plus ensoleillé, c’est juste que je me plains moins.

Ta première mixtape “Nous mêmes” a directement été certifiée platine, quels souvenirs tu gardes de cette époque ?

Je garde que du positif, ça a fonctionné, regarde platine ! Après, j’ai un petit regret, c’est de ne pas avoir fait de concert. J’aurai dû commencer beaucoup plus tôt, donc c’est ce que je vais faire maintenant. Je sais que j’ai plein de fans qui veulent me voir dans leur ville, donc on va aller les voir.

C’est un truc que tu n’as pas beaucoup fait, d’aller à la rencontre de ton public ?

Non, pas du tout. En plus on a eu des opportunités, comme faire des tournées, mais j’étais dans un autre délire, je préférais faire des shows, venir pour 20/30 minutes, pas forcément plus. Tu sais, il y a deux-trois ans, je ne pensais pas comme aujourd’hui, maintenant je sais que c’est le concert qui crée une vraie relation avec le public. Après là, j’ai la chance de pouvoir venir défendre 3 projets, j’ai beaucoup de sons que les gens connaissent donc les concerts vont être magnifiques.

Tu disais en interview que le but de  ton premier album “Dans les Yeux” était d’essayer de plus te confier, pour que le public puisse t’identifier sans être uniquement le mec de “Je pense à toi”, est ce que tu as trouvé ça réussi avec le recul ?

Bien sûr, dans “Dans les Yeux”, je trouve que je me suis bien livré, maintenant les gens arrivent à m’identifier, j’ai fait des sons comme “Ce Matin” par exemple, où je me livre beaucoup. Pour moi cette étape a été validée, il est bientôt platine en plus, avec les nouvelles réglementations de streaming, en fait il a plus streamé que “Nous Mêmes” en vrai, mais les règles ont changées entre temps.

 Et c’est quoi le but de “Ma Ruche” ?

C’est d’aller voir mon public, vraiment. C’est pour ça que j’ai voulu arriver avec un truc plus fun, avec l’histoire du miel, on va beaucoup travailler sur le merch et le textile, en communication on va aussi pousser le truc beaucoup plus loin, en image aussi. Et voilà. Il fallait un peu prendre le temps de perfectionner l’image d’Hornet.

Il s’est passé 1 an et demi depuis ta dernière sortie, comment tu as vécu les retours du premier album et cette période ? Tu es directement reparti au charbon ou tu as pris le temps de faire le vide ?

Après ma première mixtape, j’ai pris un peu de temps, on a voyagé pour les clips, j’ai essayé d’aller voir les quatre coins du monde. Après “Dans les Yeux” j’ai pris pas mal de temps pour m’enfermer en studio, j’ai fait beaucoup de séminaires au Maroc, je me suis ouvert avec plusieurs beatmakers, c’est ce qui fait que l’album est beaucoup plus riche en musicalité, qu’il est très fluide.

Quand on pense à toi, il n’y aucune éclaboussure, on entend jamais parler de toi en dehors de ta musique, comment tu vis ton statut aujourd’hui de “star” ?

En fait, un artiste reste un humain, de temps en temps j’ai des coups de folie mais ce qui compte vraiment c’est l’entourage. Je répète souvent “je marche qu’avec amitié de plus de 10 ans”, parce que c’est important de s’entourer de personnes qui te connaissent très bien, et savent ce qui est bon ou mauvais pour toi. Un poto, si je pars en couille, il va me le dire tout de suite. Moi, je pense que les artistes qui tombent dans le bad buzz c’est souvent dû à un mauvais entourage. C’est pour ça que je freine les nouveaux amis, parce qu’aujourd’hui quand tu es connu, tout le monde veut être ton pote.

Il y a un très gros travail sur l’image de la ruche autour de ce projet. Je t’ai vu dire “j’essaye de venir avec une image, parce que moi la musique ça suffit plus” sur Rapelite. Tu penses que c’est important d’évoluer et passer un cap en terme d’image ?

Bien sûr ! Regarde, moi j’ai rencontré un problème, c’est qu’on connaissait mes musiques mais qu’on ne connaissait pas ma tête, c’est pour ça que je l’ai mise en gros sur la cover de “Dans les Yeux”, c’était pour montrer qui était Hornet. Aujourd’hui les gens ne regardent plus forcément les clips avec le streaming, tu peux écouter un artiste depuis une playlist sans vouloir en savoir plus sur lui. C’est pour ça qu’on a beaucoup fait attention à travailler l’identification de mon univers musical.

C’est qui pour toi, actuellement, qui maitrise parfaitement son image dans le rap francais ?

La perfection, on va dire que c’est PNL, pour moi ça dépasse même les américains. Après les gars qui, avec un peu moins de moyens, le font très bien aussi, Vald par exemple, je trouve qu’il est super proche de son public. Après tout le monde à un rapport assez différent, c’est ça qui est bien aussi.

Et en terme de promotion, on assiste de plus en plus à des événements spéciaux pour la sortie de projet, c’est quelque chose qui te parle toi ?

Ouais bien sûr, on va essayer de rendre le truc fun, mais après ça sera jamais aussi gros qu’un PNL, parce que déjà on vend pas pareil, on va rester calme, à notre échelle. Mais par exemple, j’ai eu beaucoup de retour sur comment j’ai annoncé mon album avec une petite vidéo.

On retrouve dans l’image de la ruche, l’économie locale avec le trafic du miel des cités et le bourdonnement des guetteur mais il y a aussi la notion de travail sans relâche qui est derrière cette ruche, tu es quelqu’un qui travaille beaucoup non ?

Pour moi, tu es obligé de tout le temps travailler, je me dis très souvent que c’est jamais gagné, qu’il faut se remettre au niveau tout le temps. Les petits, ils arrivent, ils ont 16/17 ans et ils débitent ça fort. Toi t’es obligé de t’intéresser à tout ce qui se fait, moi j’écoute tout, je regarde tout. Je suis un fan de rap à la base, donc je consomme ce que je fais. Je fais pas le mec à dire “j’écoute pas untel, ou untel”, parce que c’est pas vrai. J’écoute, je regarde comment il a fait, j’apprends des autres en fait. Je suis un gars qui charbonne parce que je me dit qu’il faut être au niveau tout le temps mais aussi parce que je suis le capitaine de mon équipe, c’est à dire que j’ai pas de producteur, si je coule tout le monde coule, donc il n’y a rien qui me motive plus que ça.

Je t’ai aussi vu dans le making of du projet « Safar » de Naar, où tu dis avoir appris avec eux de nouvelles façon et vision de travailler

À cette époque là je travaillais déjà l’album, avec Shobee et Madd. Ils m’ont appris leurs techniques qui sont plus cainri que nous, ils travaillent vraiment beaucoup avec le feeling de la musique et la topline. Ils se prennent beaucoup plus la tête sur les mélodies, j’ai beaucoup appris avec eux. “Nous Mêmes” et “Dans les Yeux”, c’est des projets que j’ai fait dans mon coin, là je me suis ouvert pour apprendre de l’extérieur, c’est ce qui en fait un projet très riche en musicalité.

La vie de quartier reste très présente dans ta musique, tu dis “la mort en sachet, clicos qui défilent, le gérant a le vertige” dans “Plus le temps”, je voulais savoir si toi tu avais le vertige, on peut te voir dans le clip en haut d’un bâtiment au bord du vide, c’était comment ?

Non, j’ai pas du tout le vertige ! J’étais vraiment sur le toit de ma cité, il n’y a pas de trucage, c’est là où j’ai grandi. L’équipe technique était chez les potos, la scène où je compte les billets c’est chez un autre poto, c’est vraiment fait maison.

Et dans la vie en général, est ce que tu as peur de tomber ? Parce que tu es arrivé rapidement très haut dans la musique

Il faut avoir peur de tomber, la vie pour moi c’est un challenge, c’est pour ça que je te dis c’est jamais gagné, il faut avoir peur, tout le monde peut tomber.

Tu dis aussi que tu as “la misère au bout du bigo”, tu vis toujours à Epinay, tu as jamais eu envie de te mettre en mode avion et de couper cette relation avec la misère ?

C’est là où il ne faut pas se perdre, moi aujourd’hui j’ai l’occasion de voyager, de respirer et voir autre chose que le quartier. Mais il n’y a pas d’endroits plus sincère que chez moi en vrai. Il ne faut pas perdre le délire de là où tu viens, c’est super important pour moi de rester dans mon quartier, de m’en entourer pour pousser les jeunes de là bas à accomplir des choses dans leur vie. Si demain je ne reviens pas au quartier, ça veut dire que j’ai pris ce qu’il y avait de bon pour ma carrière et maintenant que je suis devenu quelqu’un de bon pour eux, je me casse, c’est pas bien. J’essaye de redonner goût aux jeunes, de devenir un bon exemple. Hier par exemple, on a fait un clip avec Leïla Sy là bas, qui est une très bonne réalisatrice, mais il y a des années en arrière on était avec un petit caméscope dans le même quartier.

D’ailleurs c’est pas dit de manière explicite dans le morceau, mais aujourd’hui tu n’as “plus le temps” pour quoi ?

De me prendre la tête.

Dans les nouveautés de l’album il y a l’arrivée de Guilty dans ton entourage, est ce que tu peux me raconter un peu comment ça s’est fait ? 

C’est William, le boss de REC.118 qui nous a rapproché. Il m’a dit que c’était important que je le rencontre, parce que je n’avais jamais travaillé avec des réals pour mes projets. Guilty c’est un gars dont je connaissais le travail, il a un univers assez sombre et c’est justement quelque chose qu’il a apporté au projet et qui me manquait.

Et qu’est ce que ça a changé dans ton approche de la création ?

Ça m’a montré que je pouvais faire des choses avec lesquelles j’étais moins à l’aise. Guilty je l’ai rencontré à la fin de mon projet, mais on a fait beaucoup de choses ensemble, je sais que pour un prochain projet, je commencerais directement avec des gens comme lui. Ce qui est bien avec moi, c’est que j’ai fait mes deux premiers projets vraiment tout seul, la moindre personne qui va intégrer mon entourage va apporter une plus value à mes prochains projets. C’est comme ça qu’on évolue, il faut pas aller trop vite et respecter les étapes.

Dans chacun de tes projets on a pu retrouver un gros tube comme “Je pense à toi” et “Taga”, est ce que tu sais déjà celui qui marchera dans ce nouvel album ou justement tu es encore un peu indécis ?

Avec mon ressenti, c’est “Calumet” qui sort le 24. C’est le morceau que j’ai clipé avec Leila Sy, il rentre dans la tête, il met de bonne humeur, il rassemble, c’est du Hornet quoi. Je l’ai pas sorti avant pour le garder pour la sortie du projet, contrairement à “Taga” ou “Je pense à toi”, qui tournaient déjà plusieurs mois avant la sortie des projets.

C’est quelques chose que t’essaye de contrôler les tubes, ou c’est des morceaux que tu fais comme les autres ?

C’est vraiment au feeling, dans un album il faut plusieurs couleurs donc il faut un peu de tout. “C’est mort” avec RK et Leto par exemple, c’est un tube de la street. 

Il y a beaucoup de featurings aussi dans ce projet, tu arrives bien entourés, on a pu découvrir déjà “C’est mort” avec RK & Leto. Dans les crédits du clip on peut voir “composé par HRNN et Hornet la Frappe” tu fais des beats en plus de rapper ?

Composé non, mais réalisé oui. La forme du morceau c’est moi qui l’ai réalisée. 

Tu as acquis une certaine science du studio, au delà de poser tes voix ?  

Ouais la réalisation franchement, je commence à toucher, je sais ce qui est bon, quand il faut rentrer un pré-refrain, quand il faut faire tourner le refrain autrement, j’ai beaucoup appris, j’ai tellement enregistré de sons que maintenant je sais directement si la structure est bonne.

Sinon on peut retrouver,  Kalash Criminel, Alonzo, Da Uzi et Soolking dans ton album, comment ça s’est passé le recrutement de cette équipe ? C’est que des personnes avec qui tu es proches dans la vraie vie ou il y a eu des rencontres musicales ?

La seule personne que je ne connaissais pas c’est Alonzo, je voulais un artiste du Sud parce que je trouvais que la connexion Paris-Marseille était importante, DA c’est un gars du 93, Kalash Criminel était déjà dans mon projet “Nous Même”, mais son humain fait que c’est mon gars de ouf et qu’on parle tous les jours, Leto et RK pour moi c’est la nouvelle génération, ils sont plus jeunes mais super chaud. Je voulais changer un peu les feats qui étaient souvent les mêmes, c’est pour ça que je les ai choisis.

Il y a dans ton parcours une étape importante c’est la création de ton propre label – Diez Pefra, comment ça se passe aujourd’hui ? 

On est toujours avec la même équipe, on essaye de faire le maximum entre nous. Quand on a besoin, on prend des gars en Freelance, par exemple une attaché de presse ou quand on a besoin de tourner, on appelle un réalisateur. Mais le noyau est toujours le même. 

C’est quoi la prochaine étape du label ? Vous comptez signer des artistes, des beatmakers, ou produire des clips pour d’autres ?

Ouais prendre des gars en édition, ça m’intéresse. Pour le moment, on a des beatmakers qu’on surveille mais qui ne sont pas encore prêt.

C’est plus facile à gérer qu’un rappeur ?

Non, pas forcément. Comme je t’ai dis je marche beaucoup au feeling, donc demain si je rencontre un rappeur que je trouve trop fort je vais lui proposer quelque chose, si je peux lui apporter. Le problème c’est qu’aujourd’hui, tous les rappeurs ont déjà leur équipe, un producteur et un manageur donc c’est compliqué de le faire signer. Sauf si tu sais parfaitement ce que tu vas faire avec lui.

Et au dessus il y a Rec 118, qui semble regrouper tous les plus grands talents de France actuellement, comment tu explique ça ?

Ça montre que je suis pas fou de marcher au feeling, quand j’ai signé il n’y avait pas autant de rappeur. Et aujourd’hui de voir que c’est devenu un des plus gros labels, ça me prouve qu’il faut garder cette mentalité.

Et pour finir, comment ça se passe l’articulation entre Diez Pefra et Rec 118 ?

C’est vraiment une collaboration saine, quand on bloque sur quelques choses ils nous aident. C’est vraiment une belle équipe. 

Triple Sept

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